Un réveil difficile et électrique [PV Kyeno Shamaïtsu] [Finit]

Voir noir était une chose qui m'était habituelle à présent. Depuis le temps que j'étais aveugle, j'avais tout à fait pu m'y habituer. Il en allait de même avec les sons qui l'entourait. Partout autour de moi, des chaines cliquetaient sinistrement. Les miennes également, qui m'enserrait la cheville et m'empêcher d'atteindre les barreaux de la cage que je partageait avec trois enfants, dont Vala... Mais Vala n'était-elle pas morte..? Je portait la main à mes yeux, mais n'y trouvait nul bandeau, pas plus que la loque dont Vala s'était servi pour cacher mes yeux.

J'avais froid. Il manquait quelque chose. Je sentait l'odeur de la mort autour de moi, mais pas celle de Vala. Elle n'était pas la. Peut-être qu'on l'avait emmenée pour une nouvelle expérience pendant mon sommeil... Je tendit la main à ma droite et y rencontrait le bras d'un de mes camarades de cellule.

-Où est Vala..?
-Vala ? Elle est morte, tu ne te souviens pas ? Dans la forêt...

Ma main se mit à trembler sur le bras du garçon, mais soudain tous les sons s'évanouirent, ainsi que les odeurs, et je tomba un long moment avec l'impression d'un poids qui m'écrasait. Je finit par atterrir sur les genoux, ou quelqu'un reposait. Je sentit un liquide chaud couler sur les jambes, et posai la main sur Vala, morte sur mes genoux. Sa blessure saignait trop pour qu'elle ne soit encore en vie. Mais contre la logique même, une main se posa sur mes joue ruisselantes de larmes.

-Je suis morte Aodh... Tu as voulu aller voir. Si on avaient pas étés avec eux, je serais encore en vie...

Les doigts sur ma joue se crispèrent, comme pour me griffer. Elle avait raison. Si je n'avais pas voulu m'enquérir de l'état des bergers elle serait toujours la. Les mots se retrouvèrent coincés dans ma gorge alors que le corps de Vala devenait vent entre mes mains, et je me retrouva prostré sur le sol de la forêt. Mais il y avait un son au loin...

Mes yeux s'ouvrirent d'un coup, signe que je me réveillais, même si je ne voyais rien. Un instant, je fut pris de panique, puis je me souvint que j'étais aveugle. Mon cœur battait la chamade, et je me redressa d'un coup, haletant un peu. Mes joues étaient humides. J'y portai la main, me rendant compte que j'avais pleuré. Je m'essuya les yeux rageusement du dos de la main, puis retomba sur mon lit, finissant de reprendre mon souffle.

La fenêtre était toujours ouverte, Silister ne l'avait pas fermée avant de partir, ni moi avant de m'endormir. L'air frais que je sentait sur ma peau et l'odeur de neige que je sentait m'informa qu'il faisait nuit, ou du moins que c'était le soir.. La neige sentait un peu pareille que la nuit... Et il y avait quelqu'un dans la pièce, certainement la source des bruits qui m'avaient sorti de mon cauchemar.

-Qui est la ?

Mon bandeau était toujours sur son cintre, et mes yeux bleus-verts clair, d'après mes souvenirs, étaient visibles malgré que moi, je ne voie rien. De même, mes vêtements noirs ne me cachaient pas les bras, ou on voyait de nombreuses cicatrices, séquelles de mon enfance tourmentée.

-...Le nouveau coloc' de chambre ^^' Kyeno Shamaïtsu! Et toi, qui es-tu?
-Aodh.

Passant ma main sur mon visage comme pour en effacer les dernières traces de larmes, je réalisait que ça faisait bien trois fois en une journée que je donnais mon prénom. Des mains, je chercha le manteau de Vala. Il était à moitié tombé du lit. Je l'enfila et fourra les mains dans les poches, y trouvant la mèche de cheveux que je serra dans ma main à m'en faire blanchir les phalanges. L'odeur sur le manteau, tellement absente du cauchemar dont je venais de m'éveiller, me rassura quelque peu.

-Tu sembles avoir passé un mauvais sommeil, non?
-Sans déconner...

D'un geste prudent, je passa les jambes hors du lit et me releva pour chercher mon placard d'une main peu sur, encore peu habitué à ma nouvelle chambre. Après tout j'y était arrivé le matin même et j'avais passée ma journée à dormir... Je l'ouvrit et récupéra mon bandeau, que je plaça sur mes yeux avant de le nouer derrière mon crâne. A côté, mon nouveau camarade de chambre faisait un boucan incroyable en rangeant ses affaires. Peut-être qu'avec ma cécité, mon sens auditif s'était-il aiguisé... Quoi qu'il en soit, je sursauta en entendant un bruit de métal. Au mieux, c'était la boucle d'une ceinture, mais vu l'intensité du bruit cela m'aurais étonné... A mon avis, il s'agissait plus d'une arme. De quel genre, je ne savais pas, mais une lame ça j'en était certain. C'est donc avec plus de méfiance que j’enchainai :

-Quel heure il est ?

J'avais compris à l'odeur et à la fraîcheur de l'air qu'il était assez tard, mais je me demandais combien de temps j'avais dormi. Ce sommeil n'avait pas été très réparateur d'ailleurs... Encore une fois, je remonta le col de la veste pour en sentir l'odeur. Vala... Malgré le temps, j'avais l'impression que son odeur était aussi présente qu'autrefois sur le vêtement. Pourtant ce n'était pas vraiment possible mais pour moi c'était ainsi. Il me fallait une chose à laquelle me raccrocher. Et si Vala n'était plus la...

J'avais faim. Malgré l'heure tardive, je me demandai s'il était possible de trouver encore à manger...

-Essaye de ne pas m'approcher de trop près avec tes armes.

-Il doit être 10 h du soir ... J'ignore quelle heure il est, en fait. Je me fie seulement à ce que je vois dehors ...
-Je vois...

Cette expression ne m'était pas le moins du monde appropriée, mais qu'importe. Je ne voyais rien, c'était une image. Je me souviens que ça faisait rire Vala quand je l'utilisais. Un léger sourire, un peu nostalgique, éclaira un bref instant mon visage tandis que je me rallongeais sur mon lit. A dix heures du soir, je ne devais pas pouvoir encore trouver de quoi me mettre sous la dent... un des désavantages à rester statique quelque part, c'était qu'il y avait des horaires à respecter. Dehors, j'aurais déjà déterrée une racine ou quelque chose du genre à manger... De toute façon, j'avais l'habitude de ne pas manger sur de longues périodes, je n'allais pas en mourir.

-C'est qu'une mesure de précaution... j'ai des drôles de pressentiments, ces temps-ci.

A vrai dire, je n'étais pas vraiment tranquille non plus, mais je mettais plus cela sur le compte de mon arrivée en ces lieux que je ne connaissais pas. Après tout, la seule - et longue - fois ou j'avais résidé quelque part, dans mes souvenirs cela ne se référait pas à la maison de mes parents dont je gardais trop peu de souvenirs, mais les cachots ou nous étions tous enfermés, guettant la prochaine horreur qui allait nous être infligée. Pas de quoi vous encourager à aimer les bâtiments...

-Hum...

Je n'étais pas vraiment bavard, aussi fut-ce la seule remarque qui sortit de ma bouche en cet instant. Je n'allais pas dormir à nouveau, enfin pas tout de suite. Peut-être plus tard... Je me demanda alors comment j'allais faire pour ne pas m'ennuyer dans mes périodes de blanc, si je ne voyageais plus. La lecture était exclue, j'imagine que vous comprendrez aisément pourquoi. C'était à réfléchir... En attendant, je m'allongea sur le lit à nouveau, croisant mes mains derrière ma tête. A nouveau, je me remit à penser à la période ou Vala et moi, nous voyagions ensemble un peu partout à la recherche de ses parents. Nous ne les avions jamais trouvés. Peut-être quand j'en aurais finit ici, ou que je me serais lassé, je repartirais les chercher, ne serais-ce que pour leur annoncer la mort de leur fille.

C'est idiot pourtant... Cela faisait des mois qu'elle était morte, et pourtant ça faisait toujours aussi mal... A nouveau, mon cœur se serra au souvenir de Son sang se répandant sur mes genoux, des derniers mots qu'elle m'avait entendu lui dire sans jamais pouvoir me donner la réponse. Je ne saurais jamais si les sentiments que j'avais - et que j'ai toujours d'ailleurs - pour elle étaient réciproques ou non.

Secouant un peu la tête, je revint au présent.

-Sais-tu si on peut encore trouver à manger à cet heure-ci..?

-Hm... à vrai dire, je ne connais pas encore bien les lieux...la cafétéria ne devrait-elle pas être fermée à cette heure-ci ? ^^'

C'est bien ce qui me semblait... N'importe ou qui soit habité, il n'y avait pas moyen de trouver à manger après 10h du soir... Je soupira. Bon, je pourrais patienter, après tout il m'était arrivé de passer plusieurs jours sans manger, que ce soit parce-que l'on ne trouvaient rien avec Vala ou parce-que mes geôliers oubliaient de nous nourrir... Je me souviens d'une fois ou l'un des enfants était tellement affamé qu'il s'était mangé une main. Il était mort d’hémorragie quelques heures plus tard...

Parfois, j'hésitai à dire quel partie de ma vie qui était la pire : Celle où j'avais été dans ces geôles, ou celle où Vala était absente... En général, la réponse dépendait des souvenirs qui me revenaient en tête au moment ou j'y pensais. Avec l'épisode de cet enfant qui était mort, ça penchait plus vers les cachots... Puis les souvenirs de mon rêve vinrent s'ajouter à ma réflexion, et la mort de Vala me frappa à nouveau avec tout l'impact qu'aurais pu avoir un coup de masse.

-J'ai peut-être quelque chose pour toi, si tu as faim !

Ainsi tiré de mes sombres pensées, je relevais un peu la tête et l'écoutais fouiller dans ses affaires. Décidément, ça n'allait pas être de tout repos de vivre avec des gens... Surtout si je restait un long moment ici. Et vu que je n'avais nul part ou aller, ça risquait d'être le cas... Puis il marcha vers moi, et la méfiance que j'éprouvais en permanence se réveilla quelque peu à l'égard de ce garçon qu'après tout je ne connaissais pas du tout.

-C'est une barre de chocolat...Ça remplit l'estomac en un rien de temps! ^^

Je tendit la main en avant avec méfiance jusqu'à rencontrer le bras du garçon, puis récupérais ce qu'il avait en main. Un objet un peu long et épais, emballé dans du plastique. Une barre en chocolat... Je l'ouvrit, puis sentit pour vérifier qu'il s'agissait bien de chocolat. Apparemment oui... Et une vague de nostalgie m'attaqua soudain. La dernière fois ou j'avais mangé du chocolat remontait à avant les huit ans, lorsque mes parents étaient encore de ce monde.

-Merci...

Je croqua dans le chocolat, puis le laissa fondre dans ma bouche tandis que la vague de souvenir me revenait en tête. Mes parents, moi sur une chaise, voyant encore mais étant libre... Une tasse posée sur la table, remplie de chocolat chaud mais sur laquelle je soufflait pour ne pas me brûler la langue... je ne me rappelais plus bien du visage de mes parents, et ce constat m'attrista. Il y avait tant de choses dont j'aurais voulu me souvenir, mais qui ne me revenaient pas en mémoire. La majorité concernait mon enfance d'avant les cachots. Je secoua un peu la tête dans l'espoir de me changer les idées, et croqua à nouveau dans le chocolat. C'est vrai que ça remplissait un peu...

-Merci...

Pour un peu, je n'avais même pas conscience de m'être répété. Peu importe, je le pensais vraiment.

J]e restai assis sur mon lit tout le temps que je mangeai la barre chocolaté, cadeau de mon nouveau colocataire. Et peu à peu, j’eus moins faim. Ce n'était pas grand chose, mais je n'avais pas un très gros estomac et cela suffisait bien à le remplir... un peu. En tout cas, je pourrais toujours manger plus tard maintenant.

-Je vais aller faire un tour...je reviendrai sûrement à l'aube. Au revoir, Aodh.
-[color:2b29=99FFCC]Au revoir...

Je l'entendit sortir et fermer la porte derrière lui. Je me retrouvai a nouveau seul dans la chambre, mais au moins à présent avais-je l'apétit relativement calmé. Le gout du chocolat dans ma bouche me rappelait toute sorte de scène floue, mais je finit par en avoir marre. Tous ces souvenirs étaient des regrets. Mais je n'arrivais pas à leurs tourner le dos... Je finit par me lever et referma mon manteau. Puis je contourna mon lit pour trouver la porte. J'allais sortir faire un tour moi aussi...

Si je devais prévoir de rester un long moment ici, il me faudrait connaître la disposition des lieux. Et pour ne pas me retrouver embêté plus tard à chercher un endroit alors que j'aurais un délais à respecter, un repérage ne serait pas du luxe... Je me mit donc en quête dans ce grand château, silencieux à cet heure de la nuit...

[HRP : bon c'est un peu baclé, mais j'avais pas grand chose à dire quoi...]